Parler à votre chien avec une voix douce et ralentie n'est pas aussi ridicule qu'il y paraît. Il s'avère que cette façon de s'adresser à votre compagnon à quatre pattes peut avoir une réelle utilité. Selon une étude publiée dans PLOS Biology menée par des chercheurs de l’Université de Genève et de l’Institut de l’Audition, centre de l’Institut Pasteur, révèle que le binôme se rencontre à mi-chemin de leurs différences pour communiquer ensemble et publié dans Le Times
SOMMAIRE
Chapitre 1 : Le rythme de la communication
Chapitre 2 : Une adaptation inconsciente héritée de la domestication
Chapitre 1 : Le rythme de la communication
Les chiens et les humains ne perçoivent pas les informations de la même manière.
Les humains vocalisent généralement avec un rythme entre quatre et sept syllables ou sons par seconde, tandis que les chiens en produisent environ deux par seconde.
Cette différence de rythme s'explique par le fonctionnement des ondes cérébrales. Nos cerveaux produisent des ondes électriques à différentes vitesses, et chez les chiens, ce sont les ondes delta, qui oscillent entre une et trois fois par seconde, qui jouent un rôle crucial dans la compréhension de nos fameuses demandes.
Les ondes cérébrales sont des oscillations électriques produites par l'activité des neurones dans le cerveau. Elles sont classées selon leur fréquence, mesurées en cycles par seconde (ou hertz), et se divisent en plusieurs catégories, jouant chacune un rôle différent dans les processus mentaux
Ondes delta (1-3 Hz) : Ce sont les ondes les plus lentes, associées aux états de sommeil profond et de relaxation. Chez les chiens, ces ondes sont essentielles pour la compréhension des ordres prononcés lentement. Les chiens traitent le langage à travers des ondes delta qui pulsent entre une et trois fois par seconde, ce qui correspond au rythme naturel de leurs propres vocalisations (aboiements, gémissements, etc.).
Ondes thêta (4-7 Hz) : Plus rapides que les ondes delta, les ondes thêta sont souvent enregistrées lors de la relaxation, de la méditation, ou des états de demi-sommeil. Elles jouent également un rôle dans la navigation spatiale,
Ondes alpha (8-12 Hz) : Ces ondes sont associées à un état de relaxation mais éveillée, souvent présente lorsqu'une personne est calme et en train de méditer. Elles participent à la coordination et à l'attention.
Ondes bêta (13-30 Hz) : Les ondes bêta sont plus rapides et prédominent lorsque le cerveau est en état d'alerte, concentré ou engagé dans des tâches cognitives actives. Elles sont courantes lors de la communication verbale rapide et de la réflexion. Chez les humains, les ondes bêta permettent de suivre des dialogues rapides ou des discours plus complexes.
Ondes gamma (>30 Hz) : Les plus rapides, elles sont associées à la cognition de haut niveau, telles que la résolution de problèmes et la conscience.
Pour vérifier l'impact du rythme de la parole sur l'écoute canine, les chercheurs ont placé des capteurs sur la tête de douze chiens et diffusé des enregistrements de leurs humains prononçant des ordres tels que « assis » ou « au pied », mais à différentes vitesses.
Les résultats ont révélé que les chiens étaient plus susceptibles d'obéir lorsque les instructions étaient prononcées lentement, ce qui correspond à leur rythme cérébral naturel. Cela montre que l'adaptation du débit de parole permet de synchroniser les signaux vocaux avec le rythme interne du cerveau canin, améliorant ainsi la compréhension.
La syllabification, un processus commun aux chiens et aux humains
La capacité des chiens à comprendre nos paroles est également liée à un phénomène appelé « syllabification ».
Ce processus permet au cerveau de découper le langage en segments plus petits, facilitant l'intégration des informations. Chez les humains, ce sont des ondes cérébrales plus rapides, les ondes thêta, qui permettent de suivre un discours rapide. En revanche, les chiens utilisent les ondes delta plus lentes pour découper les sons qu'ils entendent, ce qui explique pourquoi un discours plus prêté leur est plus accessible.
Le fait que les ondes delta dominent le traitement des sons chez les chiens explique pourquoi ces animaux répondent mieux aux ordres prononcés lentement. Lorsque les humains adaptent leur rythme de communication pour le synchroniser avec le rythme interne des chiens, cela facilite la compréhension. Ce "parler chien" favorise une meilleure connexion entre le propriétaire et l'animal, car il correspond mieux aux capacités naturelles de traitement du langage chez les chiens.
En somme, adapter la vitesse et l'intonation des paroles permet de mieux s'aligner sur le rythme cérébral des chiens, ce qui optimise la communication et favorise une meilleure compréhension des ordres.
Chapitre 2 : Une adaptation inconsciente héritée de la domestication
Cette façon de s'adresser aux chiens n'est pas sans rappeler le « parler bébé », une manière instinctive et universelle de parler aux nourrissons.
Il est possible que, dès les débuts de la domestication du chien il y a 20 000 à 30 000 ans, les humains adoptent un mode de communication similaire pour interagir avec leurs animaux. En effet, les chiens étant initialement sauvages, cette adaptation du langage humain aurait pu aider à faciliter les premières étapes de la cohabitation.
Comme l'explique Éloïse Déaux, chercheuse en comportement animal et neurosciences à l'Université de Genève et coautrice de l'étude, les humains ralentissent inconsciemment leur débit lorsqu'ils s'adressent à leurs animaux de compagnie, se rapprochant ainsi du rythme vocal de celui des chiens.
Cela favorise une meilleure compréhension et renforce le lien entre les deux espèces.
Les résultats de cette étude offrent des pistes intéressantes pour améliorer la communication avec nos chiens. Il semble pertinent de privilégier un langage simple et prêté, en utilisant des mots courts et distincts, surtout lors de l'apprentissage de nouveaux comportements. Le choix des mots et l'intonation ont également leur importance : un mot familier prononcé sur un ton enjoué peut renforcer l'effet positif de la communication.
Chapitre 3 : La communication canine : traitement des informations acoustiques et gestuelles
Les études sur la communication entre les chiens et les humains montrent que les chiens sont particulièrement sensibles à la façon dont les informations acoustiques et gestuelles leur sont transmises. En s'appuyant sur des recherches pionnières, telles que celles de P. McConnell & J. Bayliss (1985) sur la communication entre bergers et leurs border collies, et de Morton (1977) sur l'universalité des propriétés acoustiques chez les animaux, il est possible de mieux comprendre comment les chiens interprètent les signaux émis par les humains, et comment adapter nos méthodes de communication pour améliorer l'éducation canine.
Études sur la communication chiens-humains
Communication gestuelle et acoustique chez les chiens de berger
L'étude menée par P. McConnell & J. Bayliss en 1985 sur les interactions entre bergers et border collies au troupeau a révélé que les chiens sont capables de distinguer et de répondre à une large gamme de signaux acoustiques et gestuels. Les bergers utilisent des sifflets, des sons spécifiques et des gestes pour guider les mouvements des chiens lors de la conduite du troupeau. Cette étude démontre que les chiens de berger peuvent discriminer les nuances dans le ton et l'intensité des sons, ainsi que les mouvements corporels, pour répondre aux consignes avec précision. Ces observations révèlent que les chiens traitent les informations à la fois acoustiques et visuelles pour interpréter les demandes humaines.
Les propriétés universelles des intonations selon Morton (1977)
Les travaux de Morton (1977) ont mis en lumière une universalité des propriétés acoustiques des sons utilisés par différents animaux, incluant les primates et les oiseaux. Selon cette théorie, les sons aigus et mélodieux sont généralement interprétés comme apaisants ou amicaux, tandis que les sons graves et abrupts sont perçus comme menaçants ou dissuasifs. Chez les chiens, cette distinction s'applique aux interactions avec les humains : un ton de voix plus aigu et plus doux favorise une réponse positive, tandis qu'un ton plus grave et sec peut être utilisé pour marquer un comportement indésirable.
La différenciation des tons : demandes versus ordres
Pour tirer partie de ces connaissances, il est essentiel d'adapter le ton de la voix en fonction de l'intention derrière la communication. On peut distinguer deux types de communication : les demandes et les commandes.
Les demandes : Elles sont exprimées sur un ton calme et mesurée, souvent accompagnées d'une gestuelle douce. Le but est d'inviter le chien à réaliser une action, sans imposer une contrainte. Ce ton, moins direct et plus engageant, est plus en phase avec la manière naturelle des chiens de traiter les informations, car il respecte leur rythme d'interprétation et favorise une réponse plus volontaire. Cette approche repose sur le principe de coopération, plutôt que sur la simple obéissance, et s'intègre parfaitement dans une démarche d'éducation bienveillante.
Les ordres : Les ordres sont généralement utilisés dans des situations d'urgence ou lorsque le chien doit arrêter un comportement immédiatement. Ils sont énoncés sur un ton plus ferme et sec pour capter l'attention rapidement et sans ambiguïté. Cependant, il est important de limiter l'utilisation de ce ton aux situations spécifiques, car une utilisation trop fréquente peut stresser le chien et nuire à la qualité de la relation.
Le rôle des intonations et du gazouillis dans la félicitation
Le "gazouillis", ou une ton de voix aiguë et enthousiaste, est particulièrement efficace pour les félicitations. Ce type d'intonation rappelle les sons utilisés par les parents humains lorsqu'ils s'adressent à leurs bébés, ce qui crée une atmosphère positive et stimulante. Les études montrent que les chiens réagissent très favorablement à ces sons aigus et joyeux, associant cette tonalité à une récompense émotionnelle. L'utilisation du gazouillis dans l'éducation canine permet de renforcer positivement les comportements souhaités et de motiver le chien à la reproduction.
Chapitre 4 : L'utilisation du "parler chien"
Les découvertes sur le rythme de communication et les ondes cérébrales des chiens apportent une nouvelle perspective sur l'éducation canine bienveillante.
Les techniques traditionnelles, souvent basées sur des ordres fermes, voire sur des cris, s'avèrent non seulement inutiles mais aussi contre-productives pour instaurer une relation saine et harmonieuse avec un chien.
Aujourd'hui, grâce aux avancées scientifiques, il est clair qu'il faut adapter notre façon de parler à celle de nos compagnons à quatre pattes pour améliorer la compréhension et renforcer les liens.
Adaptateur son discours pour mieux communiquer
En éducation bienveillante, il est essentiel de comprendre que le chien ne perçoit pas les signaux verbaux de la même manière que nous. Son cerveau traite les informations à un rythme plus lent, et il s'appuie sur les ondes delta pour interpréter les sons.
Crier ou parler trop rapidement ne fait qu'amplifier le stress du chien et brouiller la communication.
En revanche, adopter un ton doux et un rythme plus lent permet de transmettre les consignes plus clairement et de créer un environnement propice à l'apprentissage.
Par exemple, au lieu de répéter "assis" sur un ton autoritaire ou en élevant la voix, il est plus efficace de prononcer ce mot de manière calme et contrôlée, en laissant le temps au chien de comprendre ce que l'on attend de lui . Cette approche respecte ses capacités linguistiques naturelles et lui permet de mieux saisir le message.
Le "parler chien" : un outil pour renforcer la relation
Le "parler chien" – c'est-à-dire un discours adapté à la manière dont les chiens comprennent les sons – ne se limite pas aux ordres d'obéissance. Il peut également être utilisé pour encourager le chien, le rassurer ou le guider dans des situations où il peut être stressé ou incertain. Parler à son chien d'une voix douce et lente permet de le mettre en confiance et d'établir une relation de sécurité, un élément central de l'éducation canine bienveillante.
L'utilisation de ce ton plus lent et bienveillant rappelle d'ailleurs le "parler bébé", que les adultes utilisent instinctivement pour rassurer les nourrissons. Cela montre qu'une approche empathique et respectueuse fonctionne mieux que l'autoritarisme, aussi bien pour les enfants que pour les chiens. Adopter cette approche dans l'éducation canine favoriser le renforcement positif et développer la coopération du chien, plutôt que de le forcer à obéir par crainte.
Recommandations pour une éducation canine bienveillante
En combinant les résultats des recherches sur le traitement des informations acoustiques et gestuelles, il est possible de développer des techniques de communication adaptées aux capacités des chiens :
Utiliser une ton de voix douce et des gestes fluides pour les demandes , ce qui facilite la compréhension et encourage la coopération.
Réserver les ordres fermes aux situations d'urgence , en veillant à ne pas en abuser pour éviter de stresser le chien.
Favoriser le gazouillis et les intonations joyeuses pour féliciter le chien , afin de renforcer les comportements souhaités de manière positive.
Adopter une approche empathique qui tient compte du rythme de traitement des informations chez le chien , en s'appuyant sur des techniques qui intègrent les découvertes sur les ondes delta et la syllabification.
Ces principes s'intègrent parfaitement dans mon programme "Adopter son compagnon de vie", où vous découvrez les bases essentielles pour construire une relation saine et respectueuse avec votre chien. Vous y apprendrez à adapter votre communication en fonction des besoins de votre compagnon, à choisir les bonnes techniques de renforcement positif, et à comprendre les signaux corporels pour une éducation harmonieuse et bienveillante.
Adoptez ces stratégies pour établir une relation de confiance avec votre chien, basée sur la compréhension mutuelle et le respect des capacités naturelles de votre animal.
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CONCLUSION
En résumé, bien que cela puisse paraître ridicule à première vue, parler à votre chien d'une voix douce et un peu enfantine, c'est en réalité une technique efficace pour favoriser une meilleure compréhension.
Cette adaptation inconsciente de notre langage à nos animaux domestiques révèle non seulement notre capacité à ajuster notre manière de communiquer, mais aussi la profondeur de la relation qui nous unit à eux.
Il est inutile de crier sur son chien pour obtenir de l'obéissance. Les études le montrent : parler doucement, lentement, et s'adapter à ses capacités de compréhension est bien plus efficace. Adoptez ces principes pour éduquer votre chien de manière bienveillante, et explorez notre programme pour aller plus loin dans cette démarche respectueuse et empathique
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